Deux ans après avoir quitté la Moselle pour poser bagages en Angleterre, à Wolverhampton, Boubacar Traoré se retrouve en Côte d’Ivoire pour sa première Coupe d’Afrique des nations, avec le Mali. Interview d’un jeune talent d’Afriquez qui reste fidèle à lui-même, humble et timide, malgré la trajectoire que prend sa carrière. Exclu.
Champion d’Afrique U20, médaillé de bronze de la CAN des moins de 23 ans cet été et maintenant du voyage à Abidjan avec les Aigles du Mali… Une chose est claire : Boubacar Traoré a un lien spécial avec la Coupe d’Afrique des nations. Le capitaine des Aigles en équipe Espoirs, transféré de Metz à Wolverhampton à l’été 2022 (en prêt, avant que les Wolves déboursent 11M d’euros, le 1er juillet, NDLR), s’aguerrit depuis maintenant deux saisons en Premier League. Ambitieux, le jeune milieu de terrain veut continuer à gravir les échelons.
Befoot : À quoi pense-t-on quand on évolue en Premier League et que l’on découvre sa première Coupe d’Afrique des Nations, à 22 ans ?
Boubacar Traoré : Tout d’abord, je me dis qu’évoluer dans le meilleur championnat au monde, à mon âge, fait de moi un privilégié. Ensuite, je suis dans une logique où je souhaite engranger le maximum de temps de jeu avec mon club, afin de l’aider à atteindre ses objectifs. C’est une fierté pour moi de représenter le Mali. Je n’ai aucune pression, même si ce sont mes premières sélections (il n’en compte que deux, NDLR) et que c’est ma première compétition. Cela me motive d’être ici pour ma première Coupe d’Afrique et de me battre pour ma place.
C’est une fierté pour moi d’honorer les couleurs du Mali. Je suis confiant, car nous avons une bonne équipe et un bon staff. L’objectif, c’est d’aller le plus loin possible. Dans le football, tout peut arriver. C’est mon rêve de remporter la Coupe d’Afrique des nations.
Surtout qu’en regardant en arrière, la Coupe d’Afrique des nations U23, c’était hier…
C’était un événement très important me concernant, car il s’agissait de mes premiers matchs après mon retour d’une longue blessure (à l’aine, qui l’a tenu à l’écart des terrains pendant 136 jours, NDLR). J’avoue que c’était une grande satisfaction de pouvoir obtenir la qualification pour les Jeux Olympiques en finissant parmi les trois premières équipes.
Néanmoins, en tant que compétiteur, j’aurai aimé pouvoir remporter cette Coupe d’Afrique U23, mais nous avons l’ambition de faire mieux lors des JO ! Au début, l’objectif, c’était de se qualifier, donc nous sommes contents de ce qu’il s’est passé et de notre performance (le Mali a fini troisième en battant la Guinée, 1-0, lors de la petite finale, NDLR).
Comment avez-vous vécu cette troisième place ?
L’objectif était de finir troisième pour les JO, c’était ce que nous nous étions dit. Prendre la Coupe d’Afrique en était aussi un, mais c’était secondaire pour le Mali. Il n’y a pas de regret, surtout d’être éliminé aux tirs au but (en demi-finale face au Maroc, 1-1 puis 4-3, NDLR). Ça fait mal de l’être de cette manière, mais ça fait partie de la compétition. On va dire que c’est la seule mauvaise note.
Quel souvenir gardez-vous de cette aventure ?
J’en garde un souvenir très agréable, dans la mesure où ce fut la première fois que je portais le brassard de capitaine lors d’une compétition officielle. Je me suis senti comme investi d’une grande mission auprès de mes coéquipiers, mais aussi auprès du Mali, ma nation et du sélectionneur. J’ai fait de mon mieux afin d’être un exemple pour tous mes coéquipiers, malgré la forte pression. Surtout lors du match face au Maroc, elle était énorme, car l’enjeu était une finale. Le Maroc jouait devant son public et un stade acquis à sa cause.
Racontez-nous votre première sélection avec les Aigles, il y a un peu plus d’un an.
Je l’ai honoré face à l’Algérie en novembre 2022. D’après mes souvenirs, j’avais effectué un match plutôt encourageant, car mes coéquipiers m’avaient très bien accueilli. Cela reste un grand souvenir et j’étais très motivé. Dans ma tête, c’était déjà planifié et tout le monde savait que ça allait être dur. J’étais vraiment soulagé de pouvoir enfin goûté à la sélection, après avoir joué pour les catégories inférieures du Mali.
Les fans de Metz, qui vous ont vu grandir depuis votre arrivée en provenance de Bamako, en 2019, doivent être fiers du chemin parcouru…
J’ai vécu des moments durs dans le football, comme des blessures. Mais arriver en Premier League, c’est une fierté. L’objectif, c’est d’aller encore plus haut. Je ne suis qu’au début de ma carrière, et je suis ambitieux. Wolverhampton a fait des efforts pour me garder (cet été), donc j’ai fait confiance aux Wolves. Ma carrière rêvée ? Pourquoi pas arriver dans une équipe du top 10 mondial.
Quels souvenirs gardez-vous de votre passage en Ligue 1 ?
La Ligue 1 est un bon championnat. J’ai retenu beaucoup de choses en évoluant en France. Le FC Metz gardera toujours une place particulière dans mon cœur, car il s’agit du premier club qui m’a fait confiance en Europe.
Dites-nous en plus sur votre transfert à Wolverhampton.
Ma venue chez les Wolves devait se réaliser au mois de janvier (2022). Cependant, les deux clubs n’ont pas trouvé d’accord. En tant que professionnel, je me suis remis au travail afin d’obtenir une nouvelle chance l’été suivant. Malheureusement, avec Metz, nous sommes descendus en Ligue 2, puis les négociations ont été très longues. Elles se sont finalement conclues le 1er septembre, le jour de la fermeture du mercato.
On imagine que le Molineux Stadium est à la hauteur de Saint-Symphorien…
Molineux est un stade hors du commun. Lors de tous nos matchs à domicile, il est rempli et les supporters chantent du début à la fin du match, sans s’arrêter. C’est une ambiance indescriptible. Les supporters sont également très chauds à Metz, au Saint-Symphorien. D’ailleurs, je reçois encore régulièrement des messages d’encouragement de leur part.
Vous y avez découvert la Premier League. Quel œil portez-vous sur ce championnat, considéré comme le meilleur au monde ?
Sans aucun doute, la Premier League est le meilleur championnat au monde en termes d’intensité et de la qualité des joueurs. Tous ceux qui sont sur le terrain et même sur le banc, sont des footballeurs de très haut niveau. C’est vraiment exceptionnel de se confronter à tout ce beau monde.
« Sans aucun doute, la Premier League est le meilleur championnat au monde en termes d’intensité et de la qualité des joueurs. »
Existe-t-il un meilleur apprentissage que de batailler dans l’entrejeu face à Kévin de Bruyne, Bruno Fernandes, Casemiro, Rodri ou encore Bruno Guimareãs ?
Effectivement, l’intensité au milieu de terrain est également vraiment présente. Cependant, je dois avouer que j’aime beaucoup me confronter à ce type de joueurs. Donc mon niveau progresse de jour en jour. C’est le plus haut niveau, donc c’est du travail, et de la progression. Je me suis amélioré dans le jeu, les transversales…
Vous marquez peu, et pourtant, quand ça rentre, c’est assez spectaculaire. Pourquoi ne pas plus tenter ?
Oui, j’avoue que cela fait partie de mes axes de progression. Je compte marquer beaucoup plus de buts dans les mois à venir. Mais cela passe par le travail acharné à l’entraînement, et j’ai l’intention de remédier à ce problème très rapidement.
Comment se porte le groupe depuis le départ de Julian Lopetegui, cet été, et l’arrivée de Gary O’Neil ?
Nous avons connu une saison très difficile l’an dernier, sous les ordres du coach Lopetegui. C’est vrai, mais le plus important est que, au final, il a pu réussir à sauver le club. Nous étions tous très heureux de travailler avec lui, car c’est un entraîneur avec énormément d’expériences au plus haut niveau. Gary (O’Neil) par contre, est un jeune coach très ambitieux. Je progresse tous les jours avec lui. Je suis certain qu’il sera un très grand entraîneur de Premier League.
Rayan Aït-Nouri est un autre joueur des Wolves qui va participer à la Coupe d’Afrique des nations. En avez-vous discuté dans le vestiaire ?
Rayan est un excellent ami, et effectivement, nous avons beaucoup échangé au sujet de la Coupe d’Afrique ces dernières semaines. Il est évident que si l’on vient à s’affronter, chacun va défendre les couleurs de son pays au mieux. Après le match, nous redeviendrons de bons camarades.
Quel espoir placez-vous en Éric Chelle et votre groupe ?
Éric Chelle est un coach qui est très proche de ses joueurs. Nous avons une très bonne relation, car je sais qu’il croit en mes capacités à aider le groupe, pour atteindre nos objectifs. D’ailleurs, c’est lui qui m’a invité à parler pour la première fois devant les médias, à notre camp de base, à Bamako.
Au pays, vous avez un homonyme : le célèbre chanteur Boubacar Traoré. Peut-être êtes-vous prédestiné à faire briller le Mali au football comme il l’a fait avec la musique…
Effectivement, il est très célèbre au Mali. Cependant, j’ai encore beaucoup de chemin à parcourir afin d’obtenir le même niveau de notoriété dans mon pays. Je suis quelqu’un d’humble car je viens d’une famille qui l’est. La popularité ne représente rien pour moi. Je suis humble avec tout le monde, que ce soit avec les supporters, ou tout le reste de la population.
La suite logique de tout ça, est-ce un retour en France, pour les JO 2024 de Paris ?
Il y a certains joueurs – qui ont même remporté le Ballon d’Or – qui n’ont jamais pu disputer les Jeux Olympiques. Ce serait une fierté de les disputer. Donc c’est clair que les JO sont très importants pour moi, dans la mesure où cela fait très longtemps que le Mali ne s’est pas qualifié pour cette compétition (depuis 2004, sa seule et unique participation, NDLR). Ensuite, nous avons une communauté très importante à Paris, et je n’ai pas de doute qu’ils seront tous présents pour nous soutenir lors des phases de poules. Avec leur aide, je suis convaincu que nous irons très loin dans la compétition.
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