Accéder à l’ensemble des matchs du championnat de France de Ligue 1 via un abonnement risque de bientôt devenir un vieux souvenir. Mediapro Out, Canal + qui rend ses droits, les acteurs classiques fuient la Ligue 1. Quelles solutions se présentent alors pour la Ligue de Football Professionnel qui vient de lancer une procédure accélérée d’appel d’offres ?
Naturellement, toutes les pensées se tournent vers Canal + et Maxime Saada qui pourrait bénéficier d’une Ligue 1 à prix extrêmement bas. Se tourner vers Canal + est, à coup sûr, la solution de facilité. Diffuseur historique, la chaîne cryptée connaît tous les rouages de la diffusion et son système d’abonnement avec ou sans engagement a déjà fait ses preuves.
Reste que la LFP peut innover. Diffuser la Ligue 1 via ses propres moyens ne sera à coup sûr pas la solution retenue. Les moyens techniques à réunir sont importants et la Ligue ne les possède pas forcément. D’autres ligues professionnelles diffusent les matchs de championnat avec leurs propres moyens, mais aucune n’a le modèle économique du football et cette presque dépendance aux recettes de droits télévisuels.

La crise de la COVID-19 aura des conséquences sur le mode de consommation des amateurs de football et cela, les instances dirigeantes du football français se doivent de l’envisager. En quelque sorte, la défaillance de Mediapro constitue une opportunité d’envisager ce nouveau virage. En effet, contrairement aux années 2000, le consommateur ne souhaite pas s’abonner sur la durée, encore moins le jeune public. Les amateurs de football étant plutôt jeune, il faut s’adapter à leurs caractéristiques.
La solution DAZN : Le Netflix du sport
A l’image de Netflix, DAZN est une plateforme de streaming consacré uniquement au sport. Elle propose des évènements sportifs en live mais aussi des documentaires en lien avec le sport. Présente dans plusieurs pays dans le monde (USA, Canada, Japon,….) et possédant des droits de compétitions importantes (NFL,..), elle est pour le moment peu implantée en France. En effet, l’abonnement est à 1,99 euros par mois car elle ne propose que des combats de Boxe en live et des documentaires. L’avantage de cet abonnement est qu’il est résiliable à tout moment. DAZN, dans d’autres pays, diffusent de grands évènements sportifs, ce qui peut rassurer sur ses capacités techniques à accueillir plusieurs milliers de connexions en même temps.

En obtenant des lots pour diffuser la Ligue 1 et la Ligue 2, DAZN pourrait modifier la nature de l’abonnement et pourquoi pas en faire un « Deezer ou un Spotify du football » selon le vœu de Jean-Michel Aulas.
La solution du pay-per-view : Le match à la demande
Dans l’esprit de JMA, créer un Deezer ou un Spotify du football reviendrait à segmenter de manière très précise l’achat de matchs de Ligue 1. Un peu sur le modèle de ce que propose la NBA avec son League Pass, le consommateur pourrait seulement payer pour un match ou seulement les matchs de son équipe favorite. De manière plus classique il pourra encore s’abonner pour l’ensemble des matchs de la compétition.
Dans la formule du pay-per-view, le consommateur en ressort gagnant. Il payera pour une consommation réelle contrairement à un abonnement plus classique ou il ne peut pas voir tous les matchs. La difficulté dans cette formule est de fixer le juste prix pour pouvoir attirer le maximum de consommateurs.
Cette formule risque, du côté des clubs, de créer des disparités et des divergences entre eux. Disparités car si des formules par clubs sont proposés, il est certain que tous n’auront pas le même nombre d’abonnés, du fait de leur bassin de fans et de leur popularité. Divergences aussi sur le mécanisme éventuel de redistribution des fonds.
Les droits TV à l’heure actuelle sont plutôt solidaires et redistributifs. Bien que certains critères sont mis en place par la Ligue afin que le classement ou la visibilité d’un club soit valorisé, tous les participants au championnat de France de Ligue 1 touchent une part fixe qu’en sera-t-il en cas de système pay-per-view ?
Comment financer la taxe Buffet, qui prélève environ 5% des droits TV pour financer le sport amateur ? Quelle redistribution à l’égard des divisions inférieures ? Les dirigeants des clubs parisiens, marseillais et lyonnais accepteront-ils de reverser une part de leurs recettes aux clubs nîmois, brestois et dijonnais ? Rien n’est certain.
De plus, l’Union européenne acceptera-t-elle ce système de vente des matchs alors qu’elle considère la vente centralisée comme la seule solution pour ne pas fausser la concurrence ? Enfin, ce système engendre un manque de visibilité pour les clubs. Avec les droits établis sur 4 saison sportives, il est aisé d’établir un budget prévisionnel. Mais avec le pay-per-view, comment faire surtout si aucun montant minimum n’est garanti ?
Le pay per-view a déjà fait ses preuves dans des grands évènements mondiaux (Superbowl, finale NBA) ou il a un réel intérêt. Certains sports ne pratiquent que cela, à l’image de la boxe. Mais cela est-il viable sur la durée d’un championnat de football ? Rien n’est certain. C’est pourquoi certains acteurs traditionnels n’ignorent pas ce nouvel appel d’offres de la LFP
La solution gratuite : TFI et M6
Aussi étonnant que cela puisse paraître, des chaînes à audience nationale comme TFI ou M6 se sont proposés pour diffuser les matchs de Ligue 1. Diffuser des matchs de football en prime-time peut être intéressant pour ces chaînes, d’autant plus à titre gratuit. Pour ne rien payer, elles font valoir que cela permettrait de donner de la visibilité à la compétition et aux équipes tout comme aux sponsors.
Ces chaînes ne font pas cela par philanthropie. En diffusant ces matchs à des horaires de grande audience, d’autant plus avec un couvre-feu national fixé à 18H, cela augure une bonne audience et donc des recettes publicitaires potentiellement plus abondantes.
La solution idéale : Amazon
Trop peu l’évoquent mais beaucoup en rêvent : qu’Amazon s’intéresse aux droits TV de la Ligue 1 et de la Ligue 2.
Droits TV : Et si Amazon devenait le sauveur du football français ?
Couplée la puissance numérique à la puissance financière de l’entreprise dirigée par Jeff Bezos permettrait aux clubs de l’Hexagone d’accroître leur visibilité et de devenir ultra concurrentiel. Elle possède également toute la technologie pour rapidement mettre en place la diffusion avec sa plateforme Amazon Prime.
Pourtant, alors que le GAFAM s’est déjà intéressé à de nombreux autres championnats tels que la Premier League et la Serie A, aucune communication ne pourrait laisser croire que l’entreprise basée à Seattle souhaite investir dans le football français, bien au contraire. La LFP devrait donc pour le moment ne pas encore pouvoir compter sur Amazon.
La LFP entame actuellement un virage important. Veut-elle conserver l’ancien modèle d’abonnement ou souhaite-elle renouveler son modèle de diffusion des matchs de manière à (re)conquérir un public jeune.