Ce soir Lille se déplace à Stamford Bridge pour le compte des 1/8èmes de finale de la Ligue des Champions. Si les Lillois ne partent évidemment pas favoris, ils doivent en plus de cela faire face à un creux offensif. Décryptage.
Elle est bien loin l’époque où Burak Yilmaz envoyait des pralines à tout va, où la paire Botman-Fonte était infranchissable, où Benjamin André régnait en maître face à tous les milieux de terrain de Ligue 1. Aujourd’hui le LOSC est 11ème du championnat de France mais sa saison contrastée est sublimée par cette qualification en LDC.
Si le club nordiste s’est souvent montré décisif par sa solidité défensive la saison dernière, il pouvait compter sur une attaque en forme. A l’heure d’affronter le champion d’Europe en titre, le constat est tout autre.
Cinq mois de David-dépendance
Il faut retourner au mercato estival dernier pour lire le début des complications. Christophe Galtier s’en va, Jocelyn Gourvennec arrive avec son lot de critiques, on connaît désormais la chanson. Pourtant, le club est épargné par des départs que l’on croyait certains. Sur le plan offensif, le seul Luiz Araujo quitte alors la capitale des Flandres. On reprend les mêmes hommes, mais on ne recommence pas. Là a été le début des complications pour Gourvennec. Il faut l’avouer, Lille a profité de joueurs en surrégime l’année dernière mais le surrégime, cela ne dure qu’un temps.
Devenu Roi de Lille, le « Kral » Burak Yilmaz en est la parfaite représentation. Le turc est devenu une caricature de lui-même. Ultra inefficace dans le jeu, son comportement agressif n’aide pas à combler le vide laissé par ses prestations. Yilmaz a tout de même inscrit 6 buts et délivré 5 passes décisives cette saison. Sa remise en question est également difficile à mettre en place à cause du manque de concurrence. Timothy Weah est alors le seul joueur capable de le remplacer, mais il ne donne pas satisfaction lorsqu’il bénéficie de temps de jeu. La lumière vient alors du dernier attaquant de l’équipe.
Jonathan David. Resplendissant en 1ère partie de saison, le canadien a été l’alpha et l’oméga du LOSC. A l’origine, à la passe et à la conclusion des actions, David a tout fait. Il est pendant plusieurs mois à la place de meilleur buteur de championnat ayant inscrit pas moins de 12 buts lors des 19 premières rencontres de L1. Il a aussi trouvé 3 fois le chemin des filets en Champions League. Son agent avait mis le feu aux poudres en annonçant son départ en fin de saison. Une déclaration non sans conséquences.
2022, l’année de l’inactivité
Déjà pas flamboyante en 1ère partie de saison, l’attaque lilloise ne peut plus compter sur un Jo’ David devenu l’ombre de lui-même depuis la reprise. Peu décisif, souvent dans le mauvais timing ou à faire des mauvais choix : l’arbre qui cachait la forêt s’est effondré. Depuis le 1er janvier, le LOSC, c’est 6 buts inscrits en 6 rencontres de L1. Un total bien pauvre et soutenu par le match contre Lorient où les Lillois auront bénéficié d’une réussite totale amenée par des erreurs individuelles. Pourtant, ce chiffre se rapproche des expected goals générés : 8.16 en cumulé. Une légère sous-performance qui ne fait que mettre en lumière le manque de confiance des attaquants.
Xeka, Botman (x2), Reinildo, Lihadji et un CSC sont les 6 buteurs du LOSC depuis la nouvelle année. Le rapprochement se fait très vite : où sont les attaquants ? Seul le jeune Isaac Lihadji a su trouver la faille, lui qui est l’élément offensif le moins utilisé par Jocelyn Gourvennec. Si l’ont veut aller plus loin, il est possible de décrypter ces buts au cas par cas.
Contre l’OM, Botman marque sur corner. Contre Lorient, Lihadji pousse le ballon au fond des filets après un coup de billard entre les défenseurs adverses, Reinildo reprend de la tête un coup-franc et un autre coup de pied arrêté force Moritz Jenz a poussé la balle dans ses cages. Contre Paris, Botman reprend une action individuelle d’Hatem Ben Arfa. Contre Montpellier, Xeka est bien chanceux de voir la frappe d’André lui revenir dans les pieds avec le but ouvert devant lui. Six buts, une belle efficacité sur phase arrêtée mais aucune action construite. Le public est en mesure d’en attendre beaucoup plus du champion de France en titre.
Des recrues hivernales créatives
Le LOSC a perdu Jonathan Ikoné et Yusuf Yazici cet hiver. Des départs qui auraient fait mal en juillet, mais qui sont adoucis par les nombreuses mauvaises performances des 2 hommes, même si l’ancien parisien s’était illustré en Ligue des Champions dans des moments clés. Pour compenser ces pertes, la cellule de recrutement lillois s’est penché sur 2 hommes : Edon Zhegrova et Hatem Ben Arfa.
Ce dernier connaît bien la Ligue 1 et sa fraîcheur physique inquiétait. L’ancien niçois a répondu de la meilleure des manières sur le terrain et a l’air bien en forme. De son côté, le kosovar n’a pas encore reçu beaucoup de temps de jeu de la part de son coach, seulement 15 petites minutes à se mettre sous la dent. De ce qu’ont pu voir les supporters lillois, Zhegrova est un élément qui pourrait apporter cette fibre offensive, ce petit plus dont peu de joueurs ont le secret.
Qui pour jouer sur les ailes ?
Jonathan Bamba, Edon Zhegrova, Angel Gomes et Isaac Lihadji : ils sont 4 à pouvoir jouer à ces postes importants du 4-4-2 à plat lillois. A ces joueurs doivent s’ajouter Gabriel Gudmundsson, Renato Sanches et Timothy Weah, souvent utilisés comme ailiers par l’ancien entraîneur bordelais. Après le départ de Reinildo, l’option Gudmundsson ailier gauche semble peu probable sauf si le polyvalent Tiago Djalo venait à dépanner en tant que latéral gauche, ce qui mènerait à un sacré bricolage. Une composition que l’on pourrait tout de même voir face à l’armada anglaise que présente Thomas Tuchel si Gourvennec songeait à conserver un bloc plus défensif.
Jonathan Bamba est de loin l’attaquant de flanc le plus utilisé cette saison avec presque 3 fois plus de temps de jeu que Gomes et 10 fois plus que Lihadji ! Ikone était évidemment l’ailier droit titulaire et son départ amène l’anglais à changer de côté, Jocelyn Gourvennec ne semblant pas vouloir donner sa confiance à Zhegrova depuis son arrivée dans le Nord. Toutes ces possibilités sont un véritable casse-tête, d’autant plus qu’Amadou Onana est très performant au cœur du jeu et pourrait entraîner le coach à déporter Renato Sanches sur l’aile. Bref, il y a beaucoup de possibilités.
De nombreuses options mais peu se sont montrées convaincantes. Jonathan Bamba n’a pas marqué depuis plus d’un an et n’a délivré qu’une assist cette saison. Dans le jeu, l’ancien stéphanois n’est pas déterminant, il n’élimine pas, ralentit trop souvent le jeu mais n’est jamais remis en question par son coach. Une situation qui ne manque pas d’énerver les supporters des Dogues qui aimeraient voir Bamba faire un tour sur le banc. Dans la hiérarchie, Angel Gomes vient juste après l’ancien angevin. L’ex-mancunien n’a jamais marqué en championnat et n’a délivré aucune passe dé. Il s’est montré décisif une seule fois, en Coupe de France, contre Auxerre. Edon Zhegrova et Isaac Lihadji ne jouent pas et il est difficile de les imaginer titulaires en 1/8èmes de finale de LDC.
La lumière pourrait alors venir d’Hatem Ben Arfa. Comme précisé précédemment, le prodige français est en bonne forme physique mais Jocelyn Gourvennec l’a annoncé, Ben Arfa vient pour jouer dans l’axe, parmi la doublette offensive du 4-4-2. Malgré tout, l’ancien rennais pourrait dépanner dans cette position excentrée.
Dire adieu au 4-4-2 ?
Ce dispositif a été la marque de fabrique de Christophe Galtier à Lille. Jocelyn Gourvennec l’a conservé et ne cache pas son envie de faire dans la continuité du travail réalisé par l’actuel coach des Aiglons. Malheureusement, la recette semble s’essouffler et Gourvennec est incapable de copier la recette « Galette ». Le LOSC dispose d’un effectif de grande qualité et de joueurs polyvalents. Il serait alors imaginable de voir les coéquipiers de Renato Sanches dans un système différent.
Gabriel Gudmundsson est un ailier de métier et a joué piston une partie de sa carrière et Zeki Celik a des qualités offensives évidentes, de quoi donner envie aux supporters de voir une vraie révolution avec une formation à 3 défenseurs. Le problème est que le LOSC n’a pas la profondeur d’effectif pour cela, il ne dispose que de 3 arrières axiaux (Botman, Fonte, Djalo). Le 4-2-3-1 pourrait également rappeler les grandes heures de la BIP-BIP (Bamba-Ikoné-Pépé) en imaginant un Ben Arfa en soutien de David et en mettant Burak sur le banc. Le rôle donné au canadien est alors problématique, il n’est pas un pur 9 et décroche souvent, pouvant ainsi marcher sur les pas d’un milieu offensif central positionné derrière lui.
Toute proportion gardée, un 4-3-3 avec David en attaquant de soutien à l’image de ce que faisait Firmino à Liverpool conviendrait parfaitement à l’ancien de La Gantoise. Un dispositif difficile à mettre en place mais qui honorerait la présence d’un alléchant trio au milieu André-Sanches-Onana. Le coach ne semble pas de cet avis, et on a envie de dire que c’est lui qui décide.